Responsables : Raphaël Durost et Stéphanie Desbrosse-Degobertière.
Dates de chantier : Du 06 juin au 07 juillet 2017.
Financement : Ville de Saint-Dizier, Inrap et Ministère de la Culture (DRAC Grand-Est)
Description, objectifs :
Les résultats obtenus lors des six campagnes déjà réalisées, de 2011 à 2016, documentent les douze premiers siècles historiques sur un millier et demi de mètres carrés. Ils démontrent l’attraction suscitée par ce versant de la vallée de la Marne dès le tournant d’ère, en contexte rural, à mi-chemin entre les agglomérations de Perthes et de Gourzon (Bayard-sur-Marne). Le secteur ne perd son rang qu’au XIIe siècle, lorsque l’agglomération de Saint-Dizier est créée sur l’autre rive par les seigneurs de Moëslains. Cette désertion permet de disposer de 1200 ans de vestiges archéologiques sans recouvrement urbain, illustrant de manière très fournie les différentes étapes d’un phénomène typique de cette période, à savoir la transformation d’un domaine gallo-romain en un point de peuplement alto-médiéval.
Les 1690 m² explorés ont déjà livré des témoignages matériels de chacun des douze premiers siècles historiques. Le bâtiment résidentiel du domaine gallo-romain est connu en deux secteurs présentant trois phases successives dont deux concernent les salles balnéaires, au moins utilisées jusqu’au milieu du IVe siècle. Si aucun aménagement n’est encore daté avec certitude du Ve siècle, l’emprise du bâtiment est occupée sans ambiguïté au siècle suivant puisqu’un aristocrate y est inhumé en chambre avec le mobilier caractéristique des tombes mérovingiennes dites “de chef”. Cette position au sein du bâtiment antique, à l’écart des trois tombes contemporaines de même rang de “La Tuilerie”, est singulière. Elle demande une interprétation qu’il n’est pas encore possible d’apporter. Sa datation du VIe siècle est actuellement la plus ancienne de la nécropole et suggère qu’il s’agisse de la sépulture fédératrice, suffisamment fédératrice pour donner naissance à une paroisse carolingienne dont les fondations conservées de l’église enserrent la tombe. Les habitations des défunts carolingiens sont connues par les fouilles préventives voisines du “Chêne Saint-Amand”.
La compréhension de l’habitat de l’Antiquité tardive et mérovingien demande à ce que la fenêtre d’exploration soit étendue. Dans les années à venir, deux secteurs sont prioritaires : celui situé entre les deux aires de fouilles actuelles d’une part et celui entourant les salles balnéaires d’autre part. D’un point de vue topographique, il s’agit de la pente et du pied de la pente.
Le premier secteur permettra d’étudier le lien entre ce qui semble être actuellement deux bâtiments résidentiels antiques successifs. Le décalage de leur orientation le laisse penser mais il pourrait s’agir également d’une adaptation au relief pentu. Par ailleurs ce secteur promet davantage de sépultures mérovingiennes conservées. Les pentes sont réputées attractives à cette époque et son écart du lieu de culte doit l’épargner des perturbations antérieures. Il sera très instructif de disposer de la superposition des deux phases d’occupation, de manière à observer comment les sépultures tiennent compte du bâtiment antique.
L’exploration du second secteur en bas de la pente, autour des salles balnéaires, est destinée à disposer de la puissance stratigraphique la plus importante possible. La conservation de sols antiques et de niveaux d’abandon a été constatée par les travaux des années 1960 de Louis Lepage et confirmée par nos campagnes de 2012 et 2013. Il s’agit donc du secteur le plus propice à la conservation d’aménagements aux fondations légères qui caractérisent les occupations domestiques mérovingiennes. Ici, il s’agira donc d’étudier les modalités d’abandon du bâtiment résidentiel créé au Haut Empire, et de sa succession. A cet égard, la recherche d’habitations mérovingiennes susceptibles d’appartenir à l’élite inhumée aux Crassées et à La Tuilerie est la priorité.
L’objectif de ce second programme triennal est donc de poursuivre les enquêtes historiques en cours afin de présenter un modèle exceptionnellement bien fourni de l’évolution d’un territoire rural durant les douze premiers siècles historiques, de la base de sa hiérarchie sociale jusqu’au sommet.