Salins-lès-Bains (Jura) : le camp du Château / campagne 2011

Responsable du chantier : Philippe Gandel : Chercheur associé à l’UMR ARTEHIS

Date du chantier :
Juillet-août 2011
Participation de : David Billoin, chercheur associé à l’UMR ARTEHIS

Depuis 2002, un programme de recherche pluridisciplinaire est engagé sur les sites de hauteur de l’Antiquité tardive et du haut Moyen Âge dans le département du Jura. Des fouilles programmées ont été effectuées en juillet-aout 2011 sur le site du plateau de Château-sur-Salins, correspondant à une éminence aux versants abrupts dont le sommet se compose d’une surface tabulaire d’environ vingt hectares

Elle est localisée à l’entrée sud de la reculée qui conduit à la ville de Salins-les-Bains. Les prospections effectuées sur ce plateau ont permis de déterminer deux secteurs occupés dans la fourchette chronologique Ve – VIIe siècles.
Le secteur dénommé Camp du Château est situé dans la partie centrale du plateau, autour de son point culminant (626 m). Cet espace d’environ 7000 m2 a fait l’objet de fouilles par des protohistoriens au cours du XXe siècle. C’est sur ce secteur que portent les recherches actuelles qui se focalisent sur la phase d’occupation de l’Antiquité tardive et du haut Moyen-Âge jusqu’alors peu prise en considération.

L’élément le plus visible de la dernière phase d’occupation est un système défensif partiellement implanté à l’emplacement de la citadelle hallstattienne. Les sondages entrepris montrent qu’il s’agit d’un mur construit au mortier de 1,3 m qui se prolonge sur plus de 170 m, jusqu’à la rupture de pente du versant nord. Plutôt qu’un arc de cercle sur à-pic, cette fortification serait de type éperon barré, avec un premier pôle d’occupation accolé au rempart et un second à 800 m, à l’emplacement d’un monastère médiéval occupé jusqu’à la fin de la période Moderne.
Sur la terrasse sommitale bordant le versant sud, un bâtiment quadrangulaire sur solins, aux dimensions extérieures de 9,76 m par 11,63 m, subdivisé en 3 pièces, a été mis en évidence. La céramique présente sur les sols en terre battue permet de dater l’occupation du VIe siècle. La fonction précise de cette construction reste à déterminer. Le type d’architecture et le plan se distinguent des habitats régionaux du haut Moyen Âge, généralement sur trous de poteaux, avec des élévations en terre et bois, à usage agropastoral. Certaines catégories de mobilier, notamment la verrerie et des petits objets, indiquent un statut social relativement élevé des occupants.
En 2011, toujours sur la terrasse sommitale, un édifice religieux à chevet plat a été identifié.

La construction, entourée sur trois côtés par des galeries dissymétriques, occupe une superficie de 260 m2 (18 m par 15 m). La chronologie de l’occupation est encore mal fixée, elle s’inscrit dans une fourchette Ve-Xe siècles. Des éléments de vitraux ont fait l’objet d’analyses physico-chimiques montrant qu’il s’agit d’un groupe de verre au natron produit à partir de sable de la côte syro-palestinienne, à la fin du VIIe siècle-début du VIIIe siècle.
Des sépultures sont identifiées dans l’espace intérieur et la périphérie immédiate de la construction. Deux d’entre-elles ont été fouillées en 2011 dans la galerie latérale ouest.

Elles sont constituées de deux coffrages naviformes accolés. La sépulture 1 se distingue par l’emploi de dal-les de couverture et par un fond au mortier de chaux. L’emploi de coffrages naviformes se rencontre du VIIe au XIe siècle dans le massif jurassien et se trouve systématiquement associé à un lieu de culte.
Dans le département du Jura, aucun édifice religieux du haut Moyen Âge n’avait été mis en évidence sur des sites de hauteur, bien que l’existence d’une église soit probable sur le Camp de Coldres à Briod, dominant la reculée de Conliège. Leur présence est largement mieux attestée dans la région Rhône-Alpes, en Provence ou en Languedoc. Les tombes repérées, occupant la nef, le chœur et les galeries assurent du rôle funéraire de cette église. L’une des particularités est la mise en scène topographique dont a fait l’objet cet édifice, implanté au point culminant du plateau, dans un souci d’être visible dans un très large rayon.

A ce stade de la recherche aucune interprétation globale du site ne peut être avancée. L’absence de données sur l’autre pôle occupé du plateau, sous les vestiges du prieuré clunisien de Château-sur-Salins, ne permet pas encore d’étayer d’hypothèses. La poursuite des recherches devraient permettre de mieux éclairer la fonction et la place de cet établissement.

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