Surveillance archéologique du palais des ducs de Bourgogne à Dijon / campagne 2012
Responsables : René-Pierre Lehner (Centre Castellologique de Bourgogne) et Hervé Mouillebouche (UMR ARTEHIS)
Participation des chercheurs de l’UMR : Michel Maerten chercheur associé, Guillaume Grillon, Marion Foucher, doctorante
Intervention : 1er trimestre 2012
Le site :
Le musée des Beaux-Arts de Dijon est partiellement installé dans des bâtiments du palais des ducs de Bourgogne : tour de Bar, cuisines ducales et logis neuf. La première tranche de la rénovation du musée, qui prévoit de remettre en valeur les bâtiments médiévaux et d’installer les collections médiévales dans les salles du palais des ducs, a été lancée après une étude bibliographique du bâtiment, une étude préalable de l’architecte en chef des Monument historiques et des sondages archéologiques limités.
La bibliographie, ancienne et labyrinthique, les nombreuses transformations au cours des siècles et l’emprise des usages quotidiens n’ont assurément pas facilité l’appréhension d’un bâtiment qui passe pourtant pour être le dernier grand palais princier à ne pas avoir bénéficié d’études et semblent avoir découragé les historiens contemporains. L’étude archivistique partiellement reprise par Sophie Jugie pendant les études préalables, laissait cependant deviner tout l’intérêt historique du logis de Philippe le Bon.
Le bâtiment et le chantier :
Quoi qu’il en soit, aucune prescription archéologique n’a été édictée pour accompagner le chantier, alors que les travaux ne peuvent manquer d’affecter, parfois irrémédiablement, des structures médiévales classées Monument historique. La plus grande partie du chantier s’est donc déroulée sans surveillance archéologique, jusqu’à l’intervention, à bien des égards trop tardive, du Centre de Castellologie de Bourgogne. Comme il était impossible de retarder ce chantier dont l’importance est évidemment vitale pour l’économie de la ville, les bénévoles du CeCaB interviennent pendant les interruptions de chantier. Nous avons notamment travaillé tous les week end du premier trimestre 2012. Il est difficile d’estimer la quantité d’informations archéologiques disparue avant notre intervention, mais les résultats considérables et impressionnants obtenus en quelques mois apportent néanmoins une certaine consolation.
Le logis neuf, bâti par Philippe le Bon à partir de 1450, est un massif bâtiment rectangulaire divisé dans toute sa longueur par un mur de refend. Il comprend un sous-sol et un rez-de-chaussée voûtés, deux étages carrés et trois étages de combles, qui ont partiellement brûlé dans l’incendie de 1503.
L’étude :
L’étude des maçonneries et des techniques de construction a permis de déterminer que les caves appartiennent à trois ensembles architecturaux distincts. Globalement, seules les deux caves occidentales peuvent être rattachées à la campagne de 1450.
Au rez-de-chaussée, la grande salle du sud-est a pu être identifiée avec certitude comme celle que les archives appellent l’échansonnerie. Elle est munie d’un évier monumental lié à sa fonction et ses murs portent en graffiti un blason d’échanson. L’échansonnerie est d’ailleurs idéalement placée, avec accès direct aux caves et au grand cellier du rez-de-chaussée. Un accès direct à un escalier en vis permettait de desservir aisément la salle du poêle, la chambre du duc et la grande salle situées au premier étage. À l’est, une porte extérieure mettait l’échansonnerie en relation avec les cuisines et la paneterie, et tous ces offices pouvaient desservir la grande salle par une galerie dont des traces ont été identifiées sur le pignon est du logis. Il n’est pas anodin, pour une ville comme Dijon, de constater que les deux premiers niveaux du palais étaient presque entièrement consacrés au service du vin et de la table !
Au premier étage, l’étude des élévations a permis de retrouver les traces du poêle attesté par les sources écrites, au dessus de l’échansonnerie. La grande salle, qui occupe aujourd’hui l’équivalent des premiers et deuxième étages, nous est connue dans son état restauré d’après 1503. Son volume primitif, notamment son couvrement, est actuellement inconnu.
Les second et troisième étages, très restaurés par Charles Suisse, offrent encore des murs et des enduits médiévaux en quantité plus abondante qu’on aurait pu le croire.
Les premières études ont montré que les murs de la plupart des salles des étages — sauf la grande salle — étaient couverts de lambris. En effet, on retrouve un peu partout des empochements de barres de lambris, voire des morceaux de barres, intégrées dans la maçonnerie dès la construction. Les maçonneries ont également conservé les traces de nombreux conduits verticaux : conduit d’évacuation des eaux de l’évier, et quatre conduits de latrines qui évacuaient les matières depuis les étages vers une fosse (encore pleine) conservée au centre des caves.
Les suites :
L’étude archéologique va désormais se poursuivre par l’observation des structures qui n’ont pas été affectées par le chantier, notamment la tour de la terrasse.